LE CONTEXTE 

Il ne reste rien des États-Unis démocratiques. Le dérèglement climatique, les épidémies, l’effondrement des structures sociales placent le pays dans un climat de barbarie extrême. Pour échapper à la violence omniprésente chacun se protège derrière de hauts murs et tente de survivre.
Dans ce monde en chaos, tout est à vendre y compris la police. Des bandes de pillards et de drogués brûlent les  maisons, violent et massacrent. Des réfugiés, démunis de tout, se lancent sur les routes à la recherche d’une paix hypothétique. Les milices privées règnent, les armes sont indispensables. La société américaine s’effondre, l’eau potable manque et se vend cher, la nourriture est rare et le cannibalisme réapparaît.
Sous la nouvelle Présidence, qui refuse tout service public et toutes dépenses sociales, les réfugiés constituent une main d’œuvre corvéable à volonté. Un nouvel esclavage est né.

Dans ce contexte une jeune fille élabore une nouvelle mystique qui annonce que « Dieu est changement’, qu’un ailleurs préférable est possible même loin de la Terre.

L’INTRIGUE

Lauren Oya Olamina, fille d’un pasteur noir, décrit sa vie, ses malheurs, ses projets dans une Californie soumise à la barbarie. Elle dessine avec précision, dans son journal, les caractéristiques d’une Amérique déchue, la violence des affrontements, la peur, les cadavres abandonnés.
Souffrant d’hyper empathie, elle ressent la douleur des autres mais aussi leur plaisir. Lors des combats en particulier, elle éprouve dans sa chair les blessures de ses adversaires comme si elles étaient les siennes.

Le texte débute le 20 juillet 2024. Devant la dégradation rapide des conditions de vie dans son quartier pourtant protégé par des murs, Lauren devine que les événements ne peuvent qu’empirer et qu’il faut réagir :
« Se préparer à ce qui va arriver, se préparer à survivre, concentrer toutes nos forces pour ne pas se faire éliminer par des fous, des désespérés, des bandits et des présidents qui ne savent pas ce qu’ils font »( page 63).
Elle réunit donc un paquetage  (argent, nourriture, vêtements, allumettes, armes, couverture ,…), dans la grande tradition survivaliste américaine.
Parallèlement, Lauren élabore un socle de conviction religieuse , »Dieu est changement », et commence la rédaction de sa propre Bible   » Semence de la Terre : le  Livre des vivants ».

L’élection en 2025 d’un nouveau président aggrave la situation car il suspend les mesures de protection sociale, il réduit les charges des employeurs, il supprime les dépenses liées à l’environnement, il démantèle les projets de colonisation de la Lune et de Mars.
Les attaques de pillards, drogués et incendiaires s’intensifient. Le 31 juillet 2027, le quartier de Lauren et des 11 familles qu’il comporte est incendié. Les habitants sont assassinés comme le sont les parents, frères, sœurs de la jeune fille. Celle-ci parvient à fuir avec deux voisins, un adolescent blanc et une jeune mère noire dont on a tué le bébé.
A trois, ils prennent la route et se lancent au travers d’un pays dévasté où les foules de réfugiés fuient vers le nord.
Le trio se défend, tue si cela est nécessaire et s’étoffe peu à peu avec de nouveaux membres : un homme noir, mur, qui deviendra l’amant puis le mari de Lauren, un couple mixte avec bébé, deux sœurs blanches, etc.
Au cours du trajet, émaillé de combats, de meurtres, de scènes terribles, y compris de cannibalisme, Lauren explique au groupe sa vision de Dieu et sa volonté à terme de conquérir l’Espace pour reconstruire une humanité meilleure.
Peu à peu, ses compagnons deviennent ses disciples.
« L’essentiel (…) est d’apprendre à façonner Dieu avec attention, d’éduquer sa communauté, sa famille et soi-même et de contribuer à l’accomplissement de la Destinée » ( page 289).
Enfin l’amant de Lauren conduit le groupe à une propriété isolée qui lui appartient. Après débat, les membres du groupe, au nombre d’une douzaine, décident de s’installer et de créer la première communauté  » Semence de la Terre », dénommée ESPOIR.

La suite de la saga fait l’objet d’un second tome,  » La Parabole des talents « , toujours
en référence à la Bible.
Dans une Amérique gagnée par l’obscurantisme évangéliste le plus radical, toutes les croyances autres sont bannies y compris bien sûr la nouvelle religion de Lauren.
Après cinq ans de réussite, la Communauté est détruite. Plusieurs membres sont assassinés. Lauren est réduite en esclavage et subit souffrances, persécutions, viols.
Mais, à la faveur d’un glissement de terrain, le dispositif de surveillance est détruit, elle en profite pour se libérer et mener la révolte avec ses camarades. Tous les tortionnaires seront éliminés.
Lauren et son mouvement finiront par vaincre la Réaction évangéliste et développeront leur enseignement propre dans l’ensemble du pays.
Avant de mourir, octogénaire,  elle voit, dans le ciel, les premières navettes quitter la Terre pour coloniser de nouvelles planètes…

CONCLUSION

Les romans de Octavia E. Butler reviennent  dans l’actualité depuis la seconde élection de Donald Trump à la Présidence des États-Unis. Rédigés il y a une trentaine d’années,  ils décrivent les dérives politiques et religieuses de la première démocratie mondiale et en tirent les conséquences en terme de dictature, de violence et de chaos.
Le message philosophique de l’autrice peut paraître décalé et naïf, surtout très inséré dans la culture afro-américaine, mais le contexte dans lequel il prend place est à la fois révélateur des angoisses de la société d’Outre-Atlantique et glaçant par les perspectives apocalyptiques qu’il annonce.